La Commission d’experts de l’OIT éliminée du Qatar

La commission d’experts a été créée en 1926 afin d’examiner les rapports gouvernementaux, en nombre croissant, sur les conventions ratifiées. Le cas du Qatar pourrait faire jurisprudence.

Un dangereux précédent

On peut s’interroger, pourquoi au Qatar ce n’est plus la commission d’experts qui travaille mais le bureau local qui est sous une pression permanente des autorités qatariennes ? Le responsable local, choisi par les qataris, dont nous parlerons prochainement, n’a pas les moyens, ni l’expérience pour résister à une pression considérable des dirigeants du Qatar.

On se demande encore comment les membres du Conseil d’Administration du BIT ont pu accepter cette opération pour le moins douteuse. Comment un homme aussi averti que Claude Jeannerot, ambassadeur délégué au CA du BIT, représentant la France, a pu accepter l’installation d’un tel bureau à Doha ? On comprend mieux aussi pourquoi Nicole Notat a refusé de le remplacer début 2018.

Il est fort probable que les rapports produits ne soient pas à la hauteur du travail à accomplir au Qatar. C’est pour cela que l’OIT, organisation quasi centenaire s’était dotée d’une commission d’experts indépendants dés 1926. Désormais au Qatar cela ne sera plus le cas.

Autre inquiétude, d’autres pays pourraient demander la mise en place d’un bureau local. Il est vrai que la mise de départ pour avoir ce type de structure est à 25 millions et le paiement des frais de fonctionnement de ce type d’organisation, au demeurant une bonne opération financière pour l’OIT. Une dérive financière pourrait-on dire qui impactera forcément la justice sociale par le monde.

Comment fonctionne la Commission d’experts de l’OIT.

Une fois qu’un État a ratifié une convention de l’OIT, il est tenu de présenter périodiquement un rapport sur les mesures prises pour lui donner effet.

Tous les trois ans, les gouvernements sont tenus de présenter un rapport expliquant les mesures qu’ils ont prises en droit et en pratique pour appliquer l’une quelconque des huit conventions fondamentales et des quatre conventions de gouvernance qu’ils ont ratifiées; pour les autres conventions, sauf celles qui ont été mises à l’écart (c’est-à-dire dont l’application n’est plus contrôlée de façon régulière), ils doivent présenter un rapport tous les cinq ans.

Des rapports sur l’application de conventions peuvent être demandés à des intervalles plus rapprochés. Les gouvernements doivent communiquer un exemplaire de leur rapport aux organisations d’employeurs et de travailleurs qui peuvent faire des commentaires à ce sujet; ces organisations peuvent également envoyer directement au BIT leurs commentaires sur l’application des conventions.

La commission d’experts a été créée en 1926 afin d’examiner les rapports gouvernementaux, en nombre croissant, sur les conventions ratifiées. Aujourd’hui, la commission est composée de 20 éminents juristes nommés par le Conseil d’administration pour une période de trois ans renouvelable. Les experts viennent de différentes régions géographiques, de divers systèmes juridiques et de différentes cultures. La commission d’experts doit fournir une évaluation impartiale et technique de l’application des normes internationales du travail au sein des Etats Membres.

La commission fait deux sortes de commentaires: des observations et des demandes directes. Les observations contiennent les commentaires sur les questions fondamentales que soulève l’application d’une convention particulière par un État. Ces observations sont publiées dans le rapport annuel de la commission. Les demandes directes portent sur des questions plus techniques ou contiennent des demandes d’éclaircissements. Elles ne sont pas publiées dans le rapport mais sont communiquées directement aux gouvernements concernés.

Le rapport annuel publié par la commission d’experts est constitué de trois parties. La partie I comprend le rapport général qui contient les commentaires sur la façon dont les États Membres ont rempli leurs obligations constitutionnelles. La partie II contient les observations sur l’application des normes internationales du travail et la partie III une étude d’ensemble.

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