Le Qatar de l’émir Tamim glisse lentement vers les ténèbres

L’émir Hamad a- t-il eu raison de laisser le pouvoir à son fils Tamim ?

Les choix hasardeux du 8e émir du Qatar

On ne s’improvise pas homme d’état, le fait d’être fils de l’émir Hamad ne donne pas automatiquement la capacité que son père avait de conduire le Qatar vers un destin lumineux. On pourrait reprocher de nombreux choix à Hamad bin Khalifa al Thani, mais force est de constater qu’il avait réussi à donner à son peuple l’espoir que demain serait meilleur.

Le point crucial fut sans doute l’indépendance du Qatar vis-à-vis du grand frère saoudien, au point tel que Hamad inquiétât les dirigeants de ce pays et grâce à l’aide d’Obama, ils poussèrent Hamad à la démission. L’émir Tamim ne mit que quelques mois pour laisser les saoudiens reprendre en mains le destin du Qatar.

Le Qatar qui aspirait à être le champion de la diplomatie internationale, tourne le dos à ce désir par ses actes. Il se retrouve aujourd’hui à participer au conflit du Yémen et à se doter d’un armement qui ne peut engendrer qu’une surenchère destructrice dans cette partie du monde.

Si la défense du pays était surtout assurée par les américains qui ont la plus grande base au monde, hors US, installée au Qatar, le choix d’ouvrir les portes aux forces armées turques est incompréhensibles historiquement. En effet dans quelques jours le Qatar va célébrer sa journée nationale annuelle dédiée au Cheikh Jassim ben Mohammed Al Thani, le deuxième émir du Qatar, appelé aussi le « Fondateur », or celui-ci n’eut de cesse de combattre les ottomans qui occupaient le Qatar. Chacun sait que le président actuel de la Turquie rêve de reconstituer le vieil empire ottoman, la naïveté de l’actuel émir du Qatar nous laisse pantois.

Mais au-delà de ces choix discutables, des évènements d’apparence plus anodins montrent les souhaits que l’émir Tamim a pour son peuple.

Sheikha Moza Unesco

La place de la femme dans la société qatarienne au temps de l’émir Hamad fit un bond en avant historique. On le doit surtout à l’implication de la deuxième femme de l’émir Hamad, Scheikha Moza mère de l’émir Tamim. Tant dans les pays du Golfe que dans le monde arabe et bien au-delà, elle porte haut la place de la femme dans la gestion de nos sociétés. Or 41 mois après la prise de pouvoir par le nouvel émir, aucune de ses épouses n’a trouvé le temps d’un engagement public afin d’œuvrer à l’émancipation de la femme au Qatar. Ceci n’est pas le fruit du hasard, mais sans doute la volonté de l’émir de revenir en arrière sur les avancées du règne précédent.

Nous pourrions citer de nombreux autres exemples, mais nous en avons choisi un dernier qui en dit long sur la vision du jeune émir du Qatar, il porte sur un embryon de liberté de la presse qui commençait à se mettre en place au Qatar.

Il y a six ans naissait un media d’information appelé Doha News, celui-ci prenait une place incontournable avec le temps au sein de la société qatarienne. Lieu d’expression public des qatariens mais aussi d’expatriés qui confrontaient ainsi leur vivre ensemble. Ce média, au 30 novembre 2016 vient d’être interdit sur le territoire du Qatar par la volonté expresse des autorités en utilisant une stupide histoire de « licences ».

doha-news-13-11-2016

Personne ne croit que c’est la raison de ce blocage. Il y a quelques jours sous forme d’humour nous indiquions que Doha News devenait « subversif » parce qu’il abordait des sujets de la vie qatarienne comme l’homosexualité, le mariage arrangé et d’autres réflexions qui traversent le Qatar et de nombreux pays dans le monde. A la lecture de ce media, presque « indépendant », observateurs du Qatar presque depuis 4 ans, nous commencions à croire que l’émir Tamim était capable de faire évoluer le « Qatar intérieur » et de rechercher un équilibre global qui allait dans le sens du progrès.

Aujourd’hui il faut bien admettre que le dernier rempart qui permettait de croire que ce peuple pouvait espérer un avenir plus lumineux, vient de céder. Sans doute, tant l’émir Hamad que la Scheikha Moza, père et mère de l’émir du Qatar doivent chaque jour s’interroger sur l’avenir de leur pays.

Finalement ont-ils eu raison de céder aux pressions saoudiennes et américaines et de confier l’avenir du Qatar à leur jeune fils ? Etait-il prêt à gouverner un Etat aussi complexe et dans un environnement autant compliqué ? Le constat est accablant, pour l’instant, le Qatar glisse vers les ténèbres et ils assistent désormais impuissants à la décadence de leur pays.