Les supporters français au même niveau que les terroristes ?

Justice

En lisant la loi du 10 mai 2016 « renforçant le dialogue avec les supporters et la lutte contre le hooliganisme » mes cheveux se sont dressés, il y aura bien un fichier stade. Si les supporters ne se mobilisent pas, ce fichier pourrait être pire que le fameux fichier S. Des droits nouveaux pour les associations de supporters sont actés mais seront-ils mis en place ? La division extrême des associations de supporters, voire leur disparition commandée parfois, déséquilibre le rapport de force entre les gestionnaires des stades et de la sécurité, et les supporters.

 

Se servant de la lutte contre le hooliganisme le fichier stade sera mis en place

Il y a 8 jours était adoptée la loi n° 2016-564 du 10 mai 2016 renforçant le dialogue avec les supporters et la lutte contre le hooliganisme parue au Journal Officiel du 11 mai sous le N°0109.

En lisant cette loi mes cheveux se sont dressés, il y aura bien un fichier stade. L’article L. 332-1 du code du sport est complété par deux alinéas ainsi rédigés : « Aux fins de contribuer à la sécurité des manifestations sportives, les organisateurs de ces manifestations peuvent refuser ou annuler la délivrance de titres d’accès à ces manifestations ou en refuser l’accès aux personnes qui ont contrevenu ou contreviennent aux dispositions des conditions générales de vente ou du règlement intérieur relatives à la sécurité de ces manifestations. « A cet effet, les organisateurs peuvent établir un traitement automatisé de données à caractère personnel relatives aux manquements énoncés à l’avant-dernier alinéa du présent article,  dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »

Il faudra compter sur la sagesse du Conseil d’Etat et de la CNIL pour que ce fichier ne devienne pas un outil d’exclusion de certains supporters et la cessation d’activité des associations où ils adhèrent. Chacun se souvient de la tentative en 2013 du PSG, la CNIL (Commission nationale informatique et libertés) avait «mis en demeure» le club parisien de renoncer à «un système d’exclusion des personnes indésirables», dénoncé par les associations de supporters et leurs avocats comme une «liste noire». Ainsi que de la récente décision du Conseil d’Etat du 13 mai 2015 : Le juge des référés du Conseil d’État suspend provisoirement la mise en œuvre du fichier « STADE ». Il estime qu’il existe, en l’état de l’instruction, un doute sérieux sur la légalité de l’arrêté du ministre de l’intérieur autorisant ce fichier. Le Conseil d’État reste saisi de la demande d’annulation de cet arrêté, sur laquelle il se prononcera prochainement de façon définitive.

Mais que contenait ce fichier ? « Le fichier peut concerner toute personne, majeure ou mineure de plus de treize ans, « se prévalant de la qualité de supporter d’une équipe ou se comportant comme tel ». Les données collectées portent sur les raisons qui ont motivé l’enregistrement de la personne dans le fichier, ainsi que sur son identité. Elles contiennent des informations relatives à sa profession, à son adresse, à ses « signes physiques particuliers », ses « activités publiques, comportements et déplacements, blogs et réseaux sociaux, en lien avec les groupes de supporters d’appartenance », aux personnes avec lesquelles elle entretient des relations. Il peut également s’agir de données issues d’autres fichiers du ministère de l’intérieur. L’arrêté prévoit en outre que les données recueillies peuvent être transmises non seulement à des autorités administratives et judiciaires, mais aussi aux clubs sportifs. »

Incroyable qu’un fichier de ce type fut imaginé et heureusement suspendu, mais qui a eu l’idée de mettre les supporters français au même niveau voir pire que la surveillance des terroristes ? En lisant la décision du Conseil d’Etat du 13 mai 2015 on comprend que c’est le PSG donc le directeur chargé de la sécurité qui est derrière cette demande. Le combat conduit par l’association de défense et d’assistance juridique des intérêts des supporters (ADAJIS) par la voix de leurs avocats pour surveiller et contester toute rédaction inappropriée, a été et va être vital pour la suite.

La loi ouvre la porte à de nouveaux droits pour les associations de supporters

« Art. L. 224-1.-Les supporters et les associations de supporters, par leur comportement et leur activité, participent au bon déroulement des manifestations et compétitions sportives et concourent à la promotion des valeurs du sport.

« Art. L. 224-2.-Est instituée une instance nationale du supportérisme, placée auprès du ministre chargé des sports, ayant pour mission de contribuer au dialogue entre les supporters et les autres acteurs du sport et de réfléchir à la participation des supporters, au bon déroulement des compétitions sportives et à l’amélioration de leur accueil. « Un décret détermine la composition, le fonctionnement et les missions de cette instance. «

« Art. L. 224-3.-Les associations sportives ou les sociétés mentionnées aux articles L. 122-2 et L. 122-12 qui participent aux compétitions organisées par une ligue professionnelle, au sens de l’article L. 132-1, assurent le dialogue avec leurs supporters et les associations de supporters. A cet effet, elles désignent, après avis des associations de supporters agréées par le ministre chargé des sports, une ou plusieurs personnes référentes chargées des relations avec leurs supporters. (Entre en vigueur le 12 aout 2016).

Un décret détermine les compétences et les conditions de désignation de ces personnes, ainsi que les conditions de leur formation. »

L’article Article 7 du Code du sport apporte la précision suivante : Le second alinéa de l’article L. 224-3 du code du sport, dans sa rédaction résultant de l’article 6 de la présente loi, entre en vigueur trois mois après la promulgation de la présente loi. La présente loi sera exécutée comme loi de l’Etat.

Que faut-il retenir de ces trois articles et de la précision apportée par l’article 7.  En plus de l’instance nationale à mettre en place après la parution du décret. Cet été, à partir du 12 août 2016 des référents seront mis en place par les clubs sportifs pour établir le dialogue avec les supporters. Les associations de supporters devront donner leurs avis. On peut comprendre aujourd’hui pourquoi des associations ont été dissoutes, qu’on traine pour la création d’autres associations notamment sur Paris et que certains clubs en particulier le PSG recherche désespérément à favoriser l’éclosion de nouveaux supporters pour que sans doute ils s’organisent en association. Nous aurons l’occasion d’en parler prochainement.