Le combat contre le terrorisme doit mobiliser un projet global

Les armes seules ne suffiront pas à éteindre le foyer allumé par l’Organisation de l’Etat islamique (OEI) ou Daesh. Il couve un feu depuis plusieurs décennies au Moyen Orient qui se repend dans le monde entier. Pour ne pas transformer le terrorisme en Hydre de Lerne il faut l’étouffer sous un manteau qui sera la base d’un projet politique à long terme.

 Les marchands de canons n’ont jamais réglé le moindre conflit

 De tous temps, l’homme a cru régler les conflits par la force, terrasser son adversaire par l’épée, le canon ou les drones aujourd’hui, permet de gagner un peu de temps. Chacun sait que les marchands de canons n’ont jamais réglé le moindre conflit, d’ailleurs ce n’est pas leur intérêt. Il ne s’est jamais vendu autant d’armes dans le monde et en particulier au Moyen Orient. Mêmes les marchands de canons allemands l’ont compris, alors qu’ils ronronnaient dans leur coin, ils viennent d’occuper la troisième place au niveau mondial de la vente d’armes et/ou d’activités annexes.

Les armes seules ne suffiront pas à éteindre le foyer allumé par l’Organisation de l’Etat islamique (OEI) dans tout le Moyen Orient. Un combat même contre une horde barbare moderne n’a de sens que s’il fait partie d’une réponse globale apportée à l’arrivé de cette barbarie.

Le revirement d’Obama

 Obama s’est fait élire aux USA en expliquant le contraire de ce qu’il fait aujourd’hui. Il fallait arrêter de couper les têtes de l’Hydre de Lerne car elles repoussaient en plus grand nombre à chaque conflit. Comme le décrit Marc Cher-Leparrain, un ancien diplomate du Quai d’Orsay ayant servi au Moyen Orient dans son article « Comment produire toujours plus de djihadistes », « Les expériences de l’Afghanistan, de l’Irak, de la Syrie, du Yémen, du Mali et même du Sinaï égyptien confirment que la force militaire, que ce soit sous forme de coalition ou sous celle de drones, aboutit à un échec systématique si elle n’est pas accompagnée d’une politique s’attaquant directement au terreau du djihadisme. »

Comment expliquer le « revirement d’Obama » ? Certes il lui était difficile de ne pas intervenir pour défendre les chrétiens d’Orient, lui qui passe son temps la main sur la Bible, mais ce qui le chagrinait le plus, c’est le contrôle de tout l’appareil pétrolier irakien par l’OEI. Ce qu’il faut aussi constater, c’est le total échec du retrait des forces américaines d’Irak sous la gouvernance d’Obama. Quelle amateurisme pour la plus grande force mondiale, des milliards dépensés pour la formation de cadres pour l’armée irakienne et d’équipements qui n’ont pas tenu plus d’une semaine face à une horde de barbares venus pour l’essentiel de l’occident et qui ont récupéré l’arment abandonné par les irakiens.

Le Sénat américain devrait mener une enquête et s’inquiéter pour l’Afghanistan. Les marchands de canons américains leader du marché mondial ont vu là une belle opportunité de relancer leur industrie en détruisant leur propre armement aux mains des combattants de l’OEI, alors ils ont fait pression sur Obama.

Ce revirement on l’a vu venir l’an passé, quand il a mis fin à l’expérience des Frères musulmans notamment en Egypte. Il avait là un projet politique pour l’ensemble du Moyen Orient et au lieu de corriger les excès de la Confrérie qui prenait le pouvoir en commettant les erreurs de jeunesse de tout politicien qui arrive à la gouvernance d’un pays, il leur a préféré le retour aux ténèbres saoudiennes.

Mettre à mal le financement du terrorisme

 L’administration américaine livre aujourd’hui en pâture les noms de ceux qui souvent qataris ou dans leur environnement, il y a quelques années ont aidé ces petits groupuscules à amasser des fonds pour combattre le syrien Bachar el-Assad, oubliant au passage d’exposer au public ceux qui saoudiens, émiratis où koweitiens en ont fait autant et plus. Le média qatari Doha News livre ces noms et les faits. L’étau se resserre sur le Qatar. Les recherches s’orientent avant tout sur les organismes caritatifs ou des riches particuliers.

S’il est difficile de faire du passé table rase, le Qatar a grand intérêt à ménager son futur, surtout que l’émir Tamim a décidé de communiquer sur le sujet. Ce n’est pas parce que aujourd’hui le Qatar, le Bahreïn, l’Arabie saoudite, les Emirats Arabes Unis et la Jordanie font partie de la coalition qui combat l’OEI qu’ils s’exonèrent de leur passé. Ils ont bien souvent soit facilité soit fermé les yeux sur des circuits de financements dont la finalité était pourtant connue. Il semble essentiel que les financements envers les groupes terroristes se tarissent quel que soit la forme pour ces pays et d’autres. L’achat de pétrole à l’OEI est insupportable pour la clarification du rôle de chacun.

Commencer la construction d’un projet global et tenir ses promesses

 Puisque l’expérience des Frères musulmans est abandonnée, il faut en construire une autre débouchant sur la création d’un état kurde qui pourrait servir d’expérimentation et de modèle à la démocratie dans un pays à base sunnite. Partager les responsabilités dans les pays du Moyen Orient, améliorer le partage des revenus, faire avancer les droits de l’homme, de la femme et dix autres sujets sont au menu de ce projet global qui demain doit bousculer le Moyen Orient. Les monarchies actuelles et les dictatures militaires aidés par les démocraties occidentales pourront abattre l’OEI, détruire le Califat autoproclamé, mais elles devront faire face sans tarder à celui qui va naitre à partir du Sinaï égyptien qui va regrouper encore plus de forces et va poursuivre l’escalade de la violence.

Il est urgentissime de commencer la construction d’un projet politique pour le Moyen Orient pour redonner espoir à la jeunesse de ces pays car on peut abattre l’OEI, on peut assécher les financements mais il faut avant tout un projet politique ambitieux pour arrêter le recrutement de jeunes qui n’ont plus d’espoir en l’avenir et qui se détruisent. Il faudra aussi dans nos pays occidentaux se donner les moyens d’une meilleure répartition des richesses et des savoirs pour que nos jeunes n’aient plus envie de rejoindre les rangs de ceux qui sont condamnés à mourir. Les indiens rêvent d’aller sur Mars peut être qu’il vaut mieux avoir des rêves aussi fous que de retomber dans l’obscurantisme.