Marlène Monteiro Freitas : une nuit infinie au Festival d’Avignon 2025

Dans la Cour d’honneur du Palais des Papes, là où résonnent les plus grandes voix du théâtre et de la danse, une femme a ouvert la 79e édition du Festival d’Avignon avec un souffle venu d’ailleurs. Marlène Monteiro Freitas, chorégraphe capverdienne au style inclassable, y a présenté sa création « NÔT », une fresque chorégraphique inspirée des contes des Mille et Une Nuits. Une œuvre envoûtante, à l’image de son autrice : libre, foisonnante, et profondément singulière.

Une artiste aux racines multiples

Née au Cap-Vert, Marlène Monteiro Freitas a grandi dans un univers musical et carnavalesque, entre les rythmes populaires de son île et les traditions festives qui mêlent le grotesque et le sublime. Elle quitte son archipel natal à 18 ans pour étudier la danse à Lisbonne, puis à Bruxelles, à la prestigieuse école P.A.R.T.S. fondée par Anne Teresa De Keersmaeker.

Installée à Lisbonne, elle fonde sa compagnie P.OR.K et développe un langage chorégraphique unique, fait de métamorphoses, de grimaces, de gestes désarticulés et de rythmes obsédants. Elle collabore avec des figures majeures de la scène contemporaine comme Boris Charmatz ou Emmanuelle Huynh, et reçoit en 2018 le Lion d’argent de la Biennale de Venise.

« NÔT » : une nuit chorégraphique

Avec « NÔT » (qui signifie « nuit » en créole capverdien), Marlène Monteiro Freitas revisite le mythe de Shéhérazade. Huit danseurs et musiciens investissent la scène pour incarner cette suspension du temps, ce moment où la parole sauve, où l’imaginaire devient acte de survie.

Le spectacle joue sur les échelles, les contrastes, les illusions nocturnes : ce qui paraît immense devient minuscule, ce qui semble grotesque devient sublime. Les visages sont grimés, les corps traversés par des flux de gestes et de sons, dans une esthétique carnavalesque qui brouille les repères.

« J’ai voulu m’appuyer sur l’idée de suspension, de reprise, d’interruption qui a lieu à chaque lever du soleil », confie-t-elle. « Pendant la nuit, les rêves semblent réalisables. »

Une vision du monde en mouvement

Marlène Monteiro Freitas ne crée pas seulement des spectacles : elle invente des mondes. Ses œuvres sont des poèmes visuels, des labyrinthes sensoriels où se croisent le théâtre, la danse, la musique, le masque, la peinture. Elle revendique une esthétique de la transformation, du trouble, de l’ambiguïté.

« Elle a su s’inventer un style, reconnaissable de pièce en pièce, une patte grimaçante et musicale », témoigne Boris Charmatz.

En 2025, elle est l’artiste « complice » du Festival d’Avignon, une figure phare d’une édition qui célèbre la langue arabe et les croisements culturels. Avec « NÔT », elle offre une nuit supplémentaire aux Mille et Une Nuits — une nuit qui appartient à l’imagination, à la liberté, à la danse.

À voir jusqu’au 11 juillet

NÔT sera joué chaque soir à 22h jusqu’au 11 juillet dans la Cour d’honneur du Palais des Papes. Une expérience sensorielle et poétique à ne pas manquer, qui ajoute — selon les mots de Jorge Luis Borges — « une nuit de plus à l’infini ».

Sur le même thème

Festival d’Avignon 2025, la Parade du Off

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.