
Depuis plusieurs semaines, une marée humaine défile dans les rues de Belgrade, Novi Sad et Niš. À leur tête : une jeunesse déterminée, souvent étudiante, qui ne réclame pas seulement des élections anticipées, mais une refondation démocratique. Leur message est clair : « L’Europe ne peut plus rester spectatrice. »
Une génération révoltée, mais tournée vers l’avenir
Le point de bascule ? L’effondrement du toit de la gare rénovée de Novi Sad, en novembre 2024. Quinze mois après l’inauguration en grande pompe d’un chantier supervisé par des entreprises chinoises, la structure s’est écroulée, faisant 16 morts. L’émotion s’est rapidement muée en colère : pourquoi les autorités n’avaient-elles pas contrôlé les travaux ? Où sont passés les millions d’euros investis ? La gare est devenue le symbole de la corruption impunie, des marchés opaques… et des dangers d’une diplomatie faite de deals sans transparence.
« Ce drame aurait pu être évité. Il résume tout ce que nous dénonçons : un État aveugle, complice ou corrompu », déplore Luka, 24 ans, étudiant en ingénierie.
Barricades et appels à l’Europe
Le week-end dernier, plus de 140 000 personnes ont manifesté à Belgrade. Des barricades ont surgi, des tentes ont été dressées, et un mot d’ordre résonne : « Prenons notre liberté en main. »
En réponse, le président Vučić a rejeté toute idée d’élections anticipées, qualifiant le mouvement de « terroriste » et évoquant un « complot étranger ». La répression a été brutale : gaz lacrymogènes, 77 arrestations, plusieurs blessés.
« Nous ne demandons pas l’aumône, mais la dignité. Et l’Europe doit choisir son camp. »
L’Europe à la croisée des chemins
L’Union européenne, principal bailleur de fonds en Serbie, reste étonnamment silencieuse. Quelques communiqués sur le respect de l’État de droit, mais aucune prise de position ferme après les violences. Ce flou alimente un euroscepticisme croissant, notamment parmi les jeunes.
« Quand des entreprises chinoises détruisent nos infrastructures et tuent nos proches, qui nous défend ? L’Europe ou personne ? », s’interroge Ana, 19 ans.
Certains sont partis à vélo depuis Novi Sad jusqu’à Strasbourg, porteurs d’une pétition, pour demander à Bruxelles de ne pas tourner le dos à leur combat.
Belgrade, juin 2025.
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