Lettre de Joaquim Azevedo, Rio de Janeiro, 12 juillet 1885

Lettre de Rio : Certains veulent l’abolition, mais sans les voix de ceux qu’elle concerne. Vous, vous les faites entendre.

Brésil : Épisode 3 bis

“Chère Cecilia,

J’ai lu vos mots avec une émotion que je peine à décrire. Ici, à Rio, nous sommes nombreux à rêver, mais peu osent écrire comme vous le faites — avec cette clarté, cette audace tranquille.

Vous parlez des invisibles. Ici, ils commencent à marcher dans les rues, à parler dans les cafés, à écrire dans les marges des journaux. Le vent tourne, oui, mais il soulève aussi la poussière. Certains veulent l’abolition, mais sans les voix de ceux qu’elle concerne. Vous, vous les faites entendre.

Je vous envoie un texte que nous avons publié dans O Abolicionista. Il parle de la terre, de l’instruction, de la liberté comme droit et non comme faveur. Si vous pouvez le faire lire à Maria, à Antonio, à ceux qui écoutent — alors vous serez, comme Nísia, une lumière dans la brume.

Mais prenez garde. On m’a suivi, on m’a interrogé. Vos cahiers doivent rester cachés. Et vos mots, bien que puissants, doivent parfois se déguiser en silence.

Continuez. Écrivez. Résistez.

Avec admiration et vigilance, Joaquim Azevedo

Réaction de Cecilia — Nuit d’encre

La lettre repose sur la table, ses bords légèrement froissés par les mains de Cecilia. Maria dort dans la pièce voisine. Antonio est parti marcher. Seule, elle relit les mots de Joaquim à la lueur d’une lampe à huile.

Cecilia (à voix basse) :

“Écrivez. Résistez.”

Elle ferme les yeux un instant. Le silence est épais, presque sacré. Puis elle ouvre son cahier, celui caché sous son lit, et écrit :

“Joaquim, vos mots sont des graines. Ici, la terre est dure, mais elle n’est pas stérile. Maria a lu votre texte. Elle a pleuré. Antonio l’a recopié dans son carnet. Moi, je l’ai appris par cœur.”

Elle s’arrête, écoute un bruit au loin — peut-être le train, peut-être le vent.

“Je ne suis pas Nísia. Je suis une voix plus faible, plus tremblante. Mais je suis là. Et tant que je pourrai écrire, je ne serai pas seule.”

Elle referme le cahier, le glisse sous son lit, puis souffle la lampe. Dans l’obscurité, ses yeux brillent encore.

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