
L’Europe adopte une approche nuancée et évolutive sur l’intégration de l’industrie de défense dans les stratégies d’investissement responsable.
Une exclusion historique… en mutation
Traditionnellement, les armes — en particulier les armes controversées comme les mines antipersonnel ou les armes chimiques — étaient exclues des portefeuilles ESG (Environnement, Social, Gouvernance). Des fonds comme le fonds souverain norvégien continuent d’appliquer des critères stricts, excluant toute entreprise impliquée dans des violations graves des droits humains ou la production d’armes interdites.
Vers une “défense responsable” ?
Depuis 2024, l’Union européenne explore une voie intermédiaire :
- La Banque européenne d’investissement (BEI) a élargi ses critères pour inclure certains investissements dans la défense, à condition qu’ils contribuent à la résilience et à la sécurité collective.
- L’ICMA, qui régit les labels obligataires verts et durables, a refusé d’inclure la défense dans les projets éligibles… mais a ouvert une consultation sur un label spécifique : celui de la “défense responsable”.
Ce label viserait à encadrer les financements liés à la défense avec des exigences similaires aux autres labels durables : traçabilité, reporting, usage des fonds, etc.
Les dilemmes persistants
Plusieurs questions restent ouvertes :
- Comment distinguer les activités de défense et celles d’attaque ?
- Que faire des technologies duales (drones, cybersécurité) utilisées à la fois dans le civil et le militaire ?
- Quels critères ESG peuvent s’appliquer à des secteurs liés à la sécurité nationale ?
Vers une régulation exigeante plutôt qu’une exclusion systématique
La Commission européenne, dans son plan ReArm Europe, encourage les États membres à investir davantage dans les capacités de défense, tout en stimulant l’innovation et la transparence. Elle ne prône pas une exclusion, mais plutôt une régulation exigeante, avec des mécanismes de contrôle, des audits éthiques et une gouvernance renforcée.
En résumé, l’Europe ne tranche pas entre rejet ou inclusion aveugle : elle cherche à encadrer l’investissement dans la défense par des normes exigeantes, tout en reconnaissant son rôle stratégique dans la sécurité et la stabilité. Une posture pragmatique, mais encore en construction.
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