Macron à Djibouti les 11 et 12 mars 2019 entretien exclusif avec Mahamoud DJAMA

Notre site WorldNewsMedias.Com a eu un entretien exclusif avec le coordinateur du MRD (Mouvement pour le Renouveau démocratie et le Développement) en Europe, M. Mahamoud DJAMA, opposant au régime en place.

Immersion à Djibouti

WorldNewsMedias.Com : Le président français Mr Emmanuel MACRON sera à Djibouti le 11 et le 12 mars 2019. Quel est l’état des relations entre la France et Djibouti ?

Mahamoud DJAMA: Les relations entre la France et Djibouti sont anciennes. Djibouti est une ancienne colonie Française. La France dispose encore à Djibouti, de la plus grande base militaire en dehors de l’hexagone, à peu près un effectif de 1400 personnes.  Donc, la visite prochaine du président Macron s’inscrit dans ce cadre des liens historiques, mais également au récent bouleversement géostratégique de la région.

Cette visite s’effectue dans le cadre d’une tournée régionale qui le conduira en plus de Djibouti, en Ethiopie et au Kenya.

L’étape de Djibouti sera plus consacrée au volet sécuritaire. Il faut savoir que Djibouti héberge l’opération Atalante d’une part et d’autre part Djibouti participe à la mobilisation régionale pour lutter contre la piraterie en Somalie. Sans oublier que le président français rend visite en tant que commandant en chef à ses militaires stationnés à Djibouti.

WorldNewsMedias.Com : A votre avis quel est l’objet de cette tournée dans la corne de l’Afrique du président Français ?

Mahamoud DJAMA: La tournée en Afrique de l’Est du président français a plusieurs volets ou objectifs. Comme je viens de dire, la tournée a trois étapes : si à l’étape de Djibouti, le volet ou sécuritaire sera mis en avant, l’aspect économique ne sera pas absent. D’autant plus que la France s’inquiète de plus en plus de la position hégémonique de la Chine sur l’économie Djiboutienne dont elle détient plus de 80% de la dette.

Après Djibouti, le président français se rendra en Ethiopie dont il souhaite prendre le pouls du changement en cours. Cette étape sera plus accès sur le volet économique pour se positionner dans ce marché de 110 millions d’habitants en plein évolution avec une croissance qui frise les deux chiffres. Le président terminera son périple au Kenya où il participera au sommet mondial de la 3ème édition du One Planet Summit qui se tiendra le 14 mars à Nairobi.

WorldNewsMedias.Com : Quel regards avez-vous en tant qu’opposant djiboutien à ce voyage du président français en terre Africaine ? D’autant plus que ces derniers temps, il y a quelques situations (exemple au Tchad ou même Djibouti), où on a l’impression qu’il y a un retour d’une francafrique, pas très glorieuse ?  

Mahamoud DJAMA: Ecoutez, je suis franco-djiboutien ou franco-africain si vous voulez.  Et, je peux facilement comprendre les intérêts de la France en Afrique ! Pour autant, je ne pense pas que la France serait perdante si la démocratie s’installait en Afrique, au contraire !

Ce qui éloigne la France de l’Afrique et surtout de la jeune Africaine, c’est la dictature des régimes soutenus par la France d’une manière ou d’une autre !

Il suffit de regarder la carte de l’Afrique pour voir que pratiquement les anciennes colonies françaises sont des dictatures à part quelques exceptions qui confirment la règle.  Et de l’autre côté, les anciennes colonies anglaises sont pratiquement démocratiques à part quelques exceptions.  Ce qui veut dire contrairement aux « pseudos gardiens » des traditions et cultures africaines  qui essaient de faire aux jeunes africains  que l’homme africain n’a pas droit à la démocratie et au liberté, la démocratie et la liberté sont des concepts africains voire universels et non des valeurs importées  chez l’homme blanc « pour dire européen ».

WorldNewsMedias.Com : si on revient sur le cas de Djibouti. Voilà un pays gouverné par la même famille pendant plus de 42 ans. L’actuel chef de l’état est à quatrième mandat et il se semble se préparer pour un cinquième mandat. Peut-on parler encore une république ? 

 Mahamoud DJAMA: Vous avez raison la question se pose. Malheureusement, l’exemple de Djibouti n’est pas unique en Afrique. Vous avez la même chose au soudan, en Algérie, Cameroun, Guinée Equatoriale, Congo, Togo…!

Le problème de la longévité au pouvoir s’accompagne d’un déclin du pays concerné.

Il faut savoir que toute évolution sociale, économique, administrative,  est équivalente à l’eau qui coule de la rivière. Si cette eau s’arrête et stagne, il y a du pourrissement qui se produit. Idem, pour l’évolution administrative, sociale, économique ou humaine.  Les pays que je viens de citer sont en train de pourrir : leur dette a explosé, la mal gouvernance est monnaie courante, la corruption est sans commune mesure, la pauvreté est endémique et le chômage est galopante.

WorldNewsMedias.Com : Dans quel état se trouve Djibouti  que vient  visiter le président Français ?

Mahamoud DJAMA : Le président Français visitera un pays isolé de la région, endetté  et qui se trouve dans une impasse politique, économique et sociale.

Je m’explique : Depuis l’arrivée au pouvoir du premier Ministre Ethiopien Dr Abiy Ahmed, le régime djiboutien est plus qu’isolé sur la scène régionale vu qu’il était lié avec un cordon ombilical avec le régime TPELF qui gouvernait l’Ethiopie depuis la chute Colonel Mengistu. Le régime djiboutien a longtemps collaboré avec ce régime Ethiopien pour faire taire toute velléité démocratique ou changement démocratique en Ethiopie. Et, la réciprocité était là. Depuis, le nouveau gouvernement cherche à se défaire l’emprise de ce voisin encombrant, vue que l’Ethiopie n’a pas de face maritime et que 90% de ses importations ou exportations passaient par Djibouti.

Par conséquent, l’Ethiopie crée les conditions d’accès à d’autres ports de la région en pacifiant la région. Ce changement en Ethiopie a un impact direct sur l’économie de Djibouti qui n’a pas su profiter du 20 ans de monopole sur le commerce éthiopien, un pays qui a une croissance exceptionnelle ces 15 dernières années. Dans son objectif de « rééquilibrage » du port de Djibouti, l’Ethiopie orientera au moins 50% de son trafic vers d’autres ports. Ceci mettra en rude épreuve, la santé financière du port de Djibouti, engagé d’un autre côté  dans un combat de nature politique avec DPWORLD.

Déjà, les premières effets de ce « rééquilibrage » produit ses effets avec son contingent de licenciements ou salaires non payés. La diminution du trafic éthiopien entrainera une diminution de la recette de l’état qui a déjà du mal à payer les intérêts de la dette. Donc, il faut s’attendre à une explosion de la dette qui dépasse déjà le 104% d’après les chiffres du FMI, mais qui s’approcherait le 120% selon des observateurs internes.

Et, vue le régime djiboutien avait verrouillé l’espace politique en pensant s’appuyer sur l’Ethiopie de TPELF, il se trouve désormais dans une impasse sans aucune capacité à faire demi-tour !

Donc, le pays se trouve dans une situation où on a l’impression  qu’il est figé dans le temps ! Les tams-tams du vieux parti RPP dont ils viennent leur quarantième anniversaire semblent être les musiciens du Titanic !

Le naufrage ne semble plus très loin !

Suite de l’entretien

Rappel :

M. Mahamoud DJAMA, opposant au régime en place est le coordinateur du MRD (Mouvement pour le Renouveau démocratie et le Développement) en Europe, il est également le chargé des relations extérieures de la plateforme Panafricaine IPDD (Initiative Panafricaine pour la Défense de la Démocratie).