Le Qatar doit revoir sa copie pour son autonomie en eau

Un événement très important va se dérouler cette année 2018 au Qatar, son autonomie en eau qui est actuellement de 72 heures maximum va augmenter progressivement pour atteindre 168 heures soit 7 jours. Toutefois ses récents choix en matière agricole et en développement du secteur privé en général remettent en question cette autonomie.

Le Water Security Mega Reservoirs Project est dépassé

Kahramaa qui est l’organisme au Qatar chargé entre autres de la problématique de l’eau, à travers le projet Water Security Mega Reservoirs Project,  avait lancé en 2014 des appels d’offres pour la fourniture de matériels pour construire 15 réservoirs géants et les infrastructures nécessaires, pour porter l’autonomie à 7 jours au lieu de 3 jours maximum actuellement.

Voilà qu’au mois de juin 2018, la première phase de ce projet vient à terme et le reste suivra assez rapidement. Un événement majeur pour ce pays et pour sa population. Toutefois, l’augmentation de la population à cause de la mise à niveau de ses infrastructures et de la préparation à la Coupe du monde 2022 ainsi que ses récents choix en matière agricole et en développement du secteur privé en général remettent en question cette autonomie. Le boycott partiel depuis le 5 juin 2017 n’a fait qu’exacerber la situation.

Aussi étrange que cela paraisse un des pays le plus riche au monde ne dispose que d’une autonomie d’eau d’environ de 60 heures pouvant être portée à 72 heures au maximum à ce jour. Alors que la population a explosé au Qatar, les réserves d’eau n’ont pas suivi à la même allure.

Sur le plan pratique, le Water Security Mega Reservoirs Project comprend 15 réservoirs, pouvant stocker 1 million de mètres cubes d’eau. Le toit des réservoirs est équipé de panneaux solaires pour générer 200 mw d’énergie. Des pipelines d’environ 650 km sont également mis en place pour relier les réservoirs aux points d’approvisionnement en eau. Plus de 55% des travaux sont gérés par des sociétés qatariennes et près de 92 millions d’heures de travail ont été accomplies sans aucun accident. Environ 24 000 personnes sont actuellement engagées dans la construction.

la bataille de l’eau

Le Qatar doit assurer avant tout une meilleure gestion de l’eau

Les résidents du Qatar consomment en moyenne 480 litres d’eau chaque jour, faisant de ce pays l’un des plus grands consommateurs d’eau du monde. Le Qatar n’a pas de rivières ni de lacs ; l’eau souterraine est la seule ressource d’eau douce disponible pour les besoins humains et agricoles du pays. La pluviométrie n’excède pas 75,2 mm par an. Avec la croissance rapide de la population et de l’urbanisation, l’utilisation de l’eau dessalée a été multipliée par 5 depuis 1995.

Historiquement, les pays du golfe ont été les premiers à utiliser le dessalement et sont actuellement les plus gros producteurs d’eau dessalée dans le monde.. Mais si la bataille de l’eau n’est pas menée plus hardiment il faut s’attendre à des situations dramatiques. Que doit faire rapidement le Qatar pour remédier à ce retard ?

Un réseau de canalisations à maintenir et à remodeler car il engendre le double de la perte habituelle, 33 % au lieu de 16 % en moyenne dans les normes internationales (NI). Ceci est en cours…

Une consommation à contrôler et stopper d’urgence, par habitant et par an elle est de 480 au lieu de 230 mètres cube (NI). Cela ne va pas assez vite…

Une nappe  phréatique  en appauvrissement galopante qui n’arrive pas à se reconstituer et qui sera à terme comme en Arabie Saoudite, non consommable.

Une salinité de 40 à 70 g/l,  ce qui engendre un coût supplémentaire pour la dessaler. Il n’y a que la mer Morte qui est plus salée.

Une double pollution, en premier lieu pour produire l’eau et en deuxième lieu par les rejets de saumure des usines de dessalement qui  posent des problèmes pour la protection de l’environnement. Le développement de l’agriculture et de la filière bovine va fortement aggraver la situation.

En conclusion provisoire

Les autorités qatariennes ont fait un pas important pour développer l’autonomie en eau au Qatar. Cependant, compte tenu que  la consommation globale par citoyen n’a pas été réduite d’une manière drastique, que les installations anciennes posent encore des problèmes, et des nouveaux choix économiques notamment en matière agricole, on peut considérer que le Water Security Mega Reservoirs Project est dépassé. Il faudrait rajouter 10 réservoirs supplémentaires dans les meilleurs délais, le Qatar a les moyens financiers pour le faire, il manque la volonté politique.