Libérer l’industrie de défense européenne de la dépendance aux normes ITAR américaines

Dans les ateliers feutrés de MBDA ou les laboratoires de Safran, une révolution discrète est en cours. Elle ne se mesure pas en décibels, mais en composants électroniques, en brevets, en lignes de code. Son objectif : libérer l’industrie de défense européenne de la dépendance aux normes ITAR américaines, ces règlements qui permettent à Washington de bloquer l’exportation de tout matériel intégrant un composant d’origine US.

Souveraineté industrielle : vers une Europe ITAR-free et technologiquement autonome

Le cas du missile Scalp, bloqué par les États-Unis en raison d’un simple composant ITAR, a été un électrochoc. Depuis, les industriels français ont lancé une vaste opération de dés-ITARisation : recréer en interne les composants critiques, investir dans des start-up stratégiques, racheter des PME en difficulté comme Dolphin, ou encore développer des microprocesseurs souverains avec Kalray.

Mais cette quête d’autonomie ne s’arrête pas aux portes des usines. Elle s’inscrit dans une dynamique européenne plus large :

• Le SCAF (avion de combat du futur) est conçu pour être ITAR-free, afin de garantir la capacité de dissuasion nucléaire sans dépendance étrangère.
• Le PADR et le Fonds européen de défense soutiennent la recherche sur les composants critiques, avec des cartographies de vulnérabilité et des feuilles de route technologiques.
• Des clauses ITAR-free apparaissent désormais dans les appels d’offres européens, comme en Allemagne pour le remplacement du fusil G36.

Cette stratégie repose sur un double pilier :

1. Réinternaliser les technologies critiques : électronique embarquée, optronique, propulsion, cybersécurité.
2. Favoriser les chaînes de valeur européennes : mutualisation des capacités, standardisation des composants, souveraineté numérique.

Mais le défi est immense. Car l’ITAR n’est pas qu’une norme : c’est un levier de puissance. S’en affranchir, c’est affirmer une volonté politique, industrielle et stratégique. C’est dire que l’Europe ne veut plus dépendre d’autorisations extérieures pour vendre, équiper, ou défendre.

Et dans ce combat feutré, chaque transistor compte.

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