
Alors que les rues de Serbie vibrent au rythme des manifestations étudiantes, c’est tout un système démocratique qui vacille. Derrière les barricades et les slogans, une réalité plus sourde s’impose : celle d’un pays où les libertés fondamentales sont grignotées, les médias muselés, et l’opposition réduite à l’impuissance.
Médias : un paysage verrouillé
En treize ans de pouvoir, Aleksandar Vučić a méthodiquement pris le contrôle de l’espace médiatique :
- 90 % des chaînes nationales sont pro-gouvernementales.
- La télévision publique RTS est accusée de relayer la propagande officielle, qualifiant les manifestants de « terroristes » ou d’« agents de l’étranger »2.
- Les tabloïds comme Informer ou Kurir mènent des campagnes de dénigrement contre les étudiants, les journalistes indépendants et les ONG.
- Les médias critiques, comme TV Nova S ou N1, sont marginalisés, attaqués en justice, ou privés de publicité.
« La Serbie est devenue un désert de l’information », déplore Branko Cecen, journaliste d’investigation.
Libertés publiques : entre surveillance et répression
- Les manifestations sont régulièrement réprimées : usage de gaz lacrymogènes, arrestations massives, violences policières.
- Des procédures judiciaires sont engagées contre des étudiants accusés de vouloir « renverser l’État ».
- La Serbie est classée 105e sur 180 à l’indice de perception de la corruption (Transparency International) et qualifiée d’autocratie électorale par V-Dem.
- Amnesty International parle d’une « prison numérique », dénonçant l’usage de technologies de surveillance contre les opposants.
Une opposition fragmentée et affaiblie
- Les partis d’opposition sont divisés, souvent discrédités, et peinent à incarner une alternative crédible.
- Les étudiants refusent de s’y rallier, préférant des formes de démocratie directe : assemblées locales, décisions collectives.
- Vučić conserve un soutien rural et âgé, notamment grâce à sa rhétorique nationaliste et à la stabilité économique relative.
« Ce n’est pas une démocratie, c’est une illusion de démocratie », résume une professeure de philosophie à Niš.
Et maintenant ?
La Serbie est à la croisée des chemins. Soit elle s’enfonce dans un autoritarisme assumé, soit elle amorce une transition démocratique portée par sa jeunesse. Mais pour cela, il faudra plus que des slogans : une opposition structurée, des médias libres, et un soutien international clair.
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